Combiner le meilleur de l’optique et des ultrasons pour réaliser des images de l’intérieur du corps humain avec une résolution de quelques microns est un challenge très ambitieux. On sait en effet qu’un faisceau de lumière perd sa cohérence dans les tissus après un parcours typique de quelques centaines de microns. La lumière ne peut donc pas être focalisée de façon conventionnelle dans la profondeur des tissus (>> mm). La solution à ce problème consiste à sculpter les faisceaux de lumière au moyen de modulateurs spatiaux de lumière (SLM) pour compenser la nature diffusive des tissus. Pour piloter ce processus des chercheurs de l’Institut Langevin avait proposé en 2010 d’utiliser la mesure et l’inversion de la matrice de transmission optique d’une tranche de tissu. Cette technique nécessite cependant de placer des détecteurs à l’intérieur des tissus ce qui en limite fortement l’intérêt pratique.
C’est pour palier à ce problème que des chercheurs de l’Institut Langevin ont proposé, dans un article publié récemment dans la revue Nature Communications, une nouvelle approche matricielle beaucoup plus générale qui combine l’utilisation simultanée de faisceaux d’ultrasons et de faisceaux de lumière. Les faisceaux d’ultrasons vont moduler la lumière et ils peuvent être facilement focalisés dans les tissus avec des résolutions submillimétriques. En mesurant la matrice de transmission de la seule lumière taguée par les ultrasons (AOTM) on peut alors extraire par une analyse des vecteurs singuliers les différentes lois de focalisation nécessaires pour sculpter cette lumière. L’énorme intérêt de cette technique est, que bien qu’on utilise des ultrasons de longueur d’onde submillimétrique, le premier vecteur singulier focalise la lumière sur des dimensions de quelques microns ouvrant la voie à une imagerie non invasive des tissus à haute résolution et en profondeur.
Référence :
Ori Katz, François Ramaz, Sylvain Gigan and Mathias Fink
Controlling light in complex media beyond the acoustic diffraction-limit using the acousto-optic transmission matrix
Nature Communications 10, 717 (2019)