Du nid d’abeille au mur de briques

Parmi les différents états du carbone, le diamant est certainement le plus prestigieux. Cependant, la mine de crayon contient une forme de carbone tout aussi passionnante bien que moins étincelante : le graphène. Il s’agit d’une mono-couche d’atomes de carbone organisés suivant un réseau en nid d’abeille. Cette organisation confère au graphène une propriété de conduction exceptionnelle, un ordre de grandeur supérieure à celle des autres semiconducteurs. D’un point de vue physique, il a été mis en évidence que cette propriété résultait de l’existence de cônes de Dirac.

Cette découverte a suscité un intérêt considérable ainsi qu’ouvert de nombreuses questions. Par exemple, le graphène est-il le seul à posséder ces cônes ? De nombreuses réponses ont déjà été apportées et des analogues du graphène ont vu le jour avec des ondes classiques. Ils ont d’ailleurs déjà été observés auparavant à l’Institut Langevin avec des ondes électromagnétiques [1], acoustiques [2] ou mêmes élastiques [3].

Dans un article récemment publié [4], les chercheurs répondent à une question plus précise : l’existence de ces cônes de Dirac est-elle une conséquence de la maille en nid d’abeille ? Ils démontrent en particulier que de tels cônes peuvent exister dans une maille carrée dite en "mur de brique" (Figure 1.a). Cette maille présente 2 atomes par cellule (carré rouge sur la figure) avec des couplages asymétriques avec les plus proches voisins.
Pour observer expérimentalement les cônes de Dirac dans le domaine électromagnétique, les chercheurs ont mis au point un méta-matériau en « mur de brique », composé d’un ensemble de résonateurs (ici, de simples fils métalliques). L’asymétrie dans le couplage entre ces résonateurs est réalisée en ajoutant un fil de longueur légèrement plus grande (Figure 1.b). En étudiant la propagation de micro-ondes à travers ce matériau, ils ont confirmé l’existence desdits cônes de Dirac (Figure 1.c). De plus, en jouant sur les caractéristiques géométriques des fils, les auteurs ont démontré que la position et les caractéristiques des cônes peuvent être ajustées finement.

En fin de compte, ce travail montre qu’il est possible de faire de l’ingénierie des matériaux pour créer des propriétés analogues aux matériaux naturels. Et ironie du sort, le nid d’abeille est remplacé par un mur de brique !

References
[1] S. Yves, T. Berthelot, M. Fink, G. Lerosey and F. Lemoult
Measuring Dirac Cones in a Subwavelength Metamaterial
Phys. Rev. Lett., 121, 267601 (2018)

[2] S. Yves, F. Lemoult, M. Fink and G. Lerosey,
Crystalline Soda Can Metamaterial exhibiting Graphene-like Dispersion at subwavelength scale
Scientific Reports, 7, 15359 (2017)

[3] M. Lanoy, F. Lemoult, A. Eddi, and C. Prada
Dirac cones and chiral selection of elastic waves in a soft strip
Proc. Nat. Ac. Sci., 117 (48) 30186 (2020)

[4] B.Li, S. Yves, A. Delory, S. Liu, M. Fink and F. Lemoult
Measuring Dirac cones in a brick-wall lattice microwave metamaterial
Phys. Rev. B, 108, 094301 (2023)

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Fabrice LEMOULT
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