Anisotropie et limites de la théorie acoustoélastique dans une plaque déformée en Ecoflex

Pour accorder sa guitare, le musicien ajuste la tension des cordes. Ce faisant, la vitesse des ondes élastiques est modifiée, conduisant à un changement de la fréquence de résonance des cordes. De manière plus générale, la vitesse des ondes élastiques dépend de la précontrainte dans le milieu dans lequel elles se propagent, c’est ce qu’on appelle l’effet acoustoélastique. Les chercheurs de l’Institut Langevin et du laboratoire PMMH ont choisi d’explorer ce phénomène à travers la propagation d’ondes élastiques dans une plaque, où la propagation se fait dans deux dimensions. Cette plaque en EcoflexTM, un élastomère en silicone quasi-incompressible, a été étirée jusqu’à plus de deux fois sa longueur initiale.
En utilisant un montage expérimental simple, ils ont mesuré les cartes de déplacement et les vitesses de deux ondes élastiques. La déformation appliquée à la plaque induit une anisotropie très particulière (voir animation ci-dessous) que l’on ne peut pas expliquer avec le formalisme d’élasticité linéaire. En effet, l’effet acoustoélastique repose essentiellement sur la théorie d’élasticité non-linéaire et des solutions dites incrémentales.
En étudiant systématiquement les vitesses et les atténuations de ces ondes, ils ont montré que la théorie acoustoélastique classique était insuffisante pour décrire leurs évolutions avec la déformation, et que l’ajout d’une contribution viscoélastique au tenseur des contraintes était nécessaire pour expliquer ces observations.
Finalement, un certain nombre de processus naturels reposent sur la déformation de tissus mous soumis à des contraintes à différentes échelles. En effet, le monde vivant est rempli d’environnements mous précontraints et les chercheurs espèrent que ce travail permettra de mieux comprendre de nombreux processus biomécaniques. De manière plus fondamentale, l’élastographie, méthode d’imagerie médicale permettant de mesurer la rigidité des tissus, montre certaines limites pour les mesures quantitatives parce que les médecins appliquent une contrainte statique aux tissus, et ce travail pourrait ouvrir la voie à une élastographie quantitative robuste.


Figure : Cartes du déplacement vertical pour une source ponctuelle et monochromatique à 200 Hz vibrant verticalement dans une plaque d’Ecoflex (épaisseur=3mm) non déformée (gauche) et dans une plaque étirée d’un facteur 2 (droite).

Reference :
A. Delory, F. Lemoult, A Eddi, C. Prada
Guided elastic waves in a highly-stretched soft plate
Extreme Mechanics Letters 61, 102018 (2023)

Contact :

Alexandre DELORY
Tél. : 01 80 96 33 42
alexandre.delory (arobase) espci.fr
Fabrice LEMOULT
Tél. : 01 80 96 30 50
Fabrice.Lemoult (arobase) espci.psl.eu

Haut de page